Samedi 19 Janvier 2019: banquise

Il a fait froid ces derniers jours. Qui dit froid dit glace. Qui dit glace dit…pont de glace! Entre Oka et Hudson, là ou navigue en été le traversier, la rivière gèle d’une rive à l’autre. L’épaisseur de glace ne permet pas encore l’ouverture du pont aux vroum-vroums (à part les vroum-vroums légers style quads et motoneiges, « quat’roues » et « ski-doo » en québécois dans le texte). Mais je me suis dit qu’à vélo ça devrait le faire.

Je pars en retard. Il fait pas chaud, genre -24, je roule avec écharpe et lunettes de ski. Le vent de dos me pousse jusqu’à Oka sans trop d’effort, j’admire le soleil se lever sur la rivière des Prairies.

Le ciel n’est pas super dégagé, mais c’est presque tant mieux parce qu’il ferait encore plus froid sinon.

Pas grand chose à signaler, j’atteins l’embouchure du pont. Bon, y’a de la neige et j’ai pas de fat bike, alors faut pousser, qu’à cela ne tienne. La banquise en vaut la chandelle.

Retour par Vaudreuil le vent dans le nez, assez dur. -23 avec 20 km/h de vent, ça forge le caractère…mon braquet de ville est toujours trop long pour ces conneries.

Au fur et à mesure, j’ai l’impression que mon vélo se congèle. L’impression que je freine en roulant, alors que c’est probablement le vent et les lubrifiants visqueux qui dissipent mon énergie.

Je manque de me faire tuer au coin Peel/Saint Antoine, à 2 m près un abruti me tournait dessus, alors qu’il était dans une voie de gauche. Chapelet de jurons vociférés à son encontre, gâchis d’adrénaline. Ça fait plusieurs fois que ça passe pas loin, ces derniers jours. Je vais me mettre à rouler avec une batte.

Traversée laborieuse du centre-ville. J’avance pas et peine à attraper les vagues vertes.

Je suis de retour vers 14h, j’ai faim et un peu l’air d’un glaçon à pédales. Mon pied gauche est plutôt froid.

Je démarre le feu, fais chauffer de l’eau. On apprécie mieux le thé après quelques heures au congélo, je trouve.

Sur Strava: https://strava.app.link/2jlwjTeiDT et https://strava.app.link/r041AEliDT

Samedi 12 Janvier 2019: vive le vent d’hiver

Enfin, une de ces froides et très ensoleillées journées d’hiver comme je les aime. L’occasion d’un exercice qui m’avait manqué: un 200 « sous zéro », ou plutôt sous -13 en l’occurence. Presque pas de photos, désolé.

Dans ma sacoche: 4 thermos de thé, des fringues de rechange en veux-tu en voilà, des biscuits, des dattes, un peu de chocolat.

Je quitte la ville par mon itinéraire de prédiction, la voie maritime du Saint-Laurent. Seul bémol: il faut passer le vélo au-dessus des barrières de l’estacade du Pont Champlain. Parce qu’évidemment, en hiver tout s’arrête et les gens/cyclistes disparaissent sous terre, alors tout ça c’est fermé. Sauf qu’en pratique le vent a balayé l’estacade sur laquelle y’a plus un pet de neige, et la voie maritime a été grattée.

Le soleil se lève. Je suis tout seul au milieu du fleuve. Les glaces chantent. C’est beau.

Ça se corse quand la route tourne vers l’ouest. Le vent est levé, la manche a air de la voie maritime bien gonflée. C’est parti pour 100 km de rude bataille.

Je me rends compte une fois arrivé sur la rive sud que le froid et la charge en partie inutile ont déchiré ma sacoche. « Oh non! », dis-je à voix haute. J’ai rien pour réparer (et par -19 autant oublier ça direct), mais j’ai une chambre à air de rechange que j’enroule autour de la victime pour limiter les dégâts.

Le vent est fort et en pleine face. J’en chie. Lindbergh a écrit à propos de sa passion aviatrice que « Adventure lay in each puff of wind », il avait raison: là en voilà, de l’aventure, dense et froide.

Évidemment, j’avance pas malgré la grande quantité d’énergie déployée. Avec les pneus à clous, le vélo de ville, la sacoche, je suis pas efficace.

Cerises sur le gâteau congelé:

  • Je teste pour la première fois des « bar mitts », sorte de gros sur-gants accrochés au guidon. C’est super efficace contre le froid, mais pour l’aérodynamisme on repassera.
  • Le rapport le plus faible sur mon vélo est 46×22. Bien trop long pour moi dans ces conditions. Je dois me mettre en danseuse souvent…ce qui nuit encore à l’aérodynamisme de l’ensemble. En gros je me sens comme une planche de contre-plaqué de 1 m par 2 m face au vent.

40 km au compteur: premiers biscuits et thé à Léry. Puis la bataille reprend. Faut pas s’arrêter trop longtemps sinon on a vite froid.

Bataille, bataille. Il fait super beau. Un peu froid aux pieds parfois, mais rien de terrible.

J’avance pas. Je peine à maintenir 17 km/h, puis 15. Je m’arrête tous les 15-20 km pour engloutir des biscuits et dattes. Le thé, bien que de moins en moins chaud, fait toujours du bien.

Je finis par arriver à Coteaux-du-Lac, ou je change un peu de cap, vers le nord. J’ai maintenant le vent un peu moins contre moi. Et il mollit. Je vais pas plus vite pour autant, ces 100 km de lutte m’ont pas mal drainé.

Km 105, pschhhhhhhh crevaison à l’avant. Dans la cambrousse et dans le vent: pas idéal. Mais il y a une maison derrière laquelle je pourrais m’abriter pas très loin. Je marche jusque là et suis accueilli par Luc, qui m’ouvre son garage et m’aide à réparer. Merci l’ami.

Je reprends la route pour un détour me permettant de contourner une route fermée en hiver par laquelle je pensais passer…quelques bornes en plus, on n’est plus à ça près.

La campagne resplendit de lumière. La quiétude est parfois troublée par les vroum-vroum des motoneiges, mais ça reste agréable.

Le vent est maintenant avec moi, mais a molli énormément. J’ai plus à me battre, sauf dans quelques petites côtes, mais je dépasse pas souvent les 20 km/h. Vue ma forme actuelle fallait pas s’attendre à un miracle de toutes façons.

J’ai faim et suis à court de biscuits. Je pousse quelques kilomètres et finis par arriver à Saint-Lazare, où je prends une soupe et des pâtes dans un café sympa. À côté de moi des nanas parlent d’applications de fitness en mangeant du gâteau au chocolat et en disant que par ce temps, y’a aucune raison d’être dehors. Bref, on n’est pas dans le même monde.

Je leur taxe leurs restes de gâteaux, jase un peu avec le gars du bistrot et repars. Le soleil vient de se coucher, il est environ 16h45 et il me reste 65 km à parcourir.

Vu que je suis rincé, j’avance pas. Mais les pâtes m’ont quand même fait du bien.

Il y a un peu de trafic du samedi soir par endroits, mais à part ça, je chantonne dans les quartiers résidentiels déserts. La nuit glaciale à venir dissuade beaucoup de faibles gens de mettre le nez dehors.

Tant bien que mal je rejoins l’île de Montréal, puis longe le fleuve jusqu’au canal de Lachine, et traverse la ville comme d’habitude, mais en plus lent.

La maison! Je suis content d’être arrivé. Ça faisait longtemps que je ne m’étais pas fatigué autant. La longue distance en hiver c’est quand même physique.

La maisonnée ne m’a pas attendu pour la raclette, mais m’en a laissé. Katia s’occupe de moi, je suis un pacha fatigué. Les patates fromagées vont me permettre de récupérer.

Sur Strava: https://www.strava.com/activities/2075658647

Samedi 19 Septembre 2015: Herkimer – Albany

Amadeus dans la chambre pourrie

Amadeus dans la chambre pourrie

Malgré la pourritude de ma chambre de motel, j’ai bien dormi. Grâce à la connexion Internet misérable, j’ai pu trouver un endroit approprié pour déjeuner: la boulangerie Heidelberg. Sur leur site, on dirait qu’ils font du vrai pain, mais faut pas se leurrer, en fait c’est bien sûr de la mie dans un sac en plastique. Certes, de la mie de toutes sortes, au levain ou pas…mais quand même, du pain mou, quoi.

Bref, bon déjeuner quand même, muffins et scone et « elephant ear », sorte de demi-palmier au sucre et à la cannelle. Un peu sucré, mais bon.

Aujourd’hui, je délaisse un peu les méandres et la vallée du canal Erie et de la rivière Mohawk pour les collines les bordant. Ça monte, quand même! J’y vais encore mollo, mais difficile d’être vraiment lent sur la bête de course qu’est Amadeus. Le haut des collines donne de vraiment bonnes vues sur la vallée, je trippe.

En haut d'une colline

En haut d’une colline

 

En montant une colline

En montant une colline

 

En montant une colline

En montant une colline

 

Un vieil atelier

Un vieil atelier

 

Schenectady

Schenectady

Aujourd’hui est une petite journée,  130 km au plus court pour rejoindre Albany. Comme je ne dois retrouver Julien qu’à 17h30, je me permets un détour par l’échelle d’écluses du canal Erie. Assez impressionnant. J’adore les canaux, ça donne presque envie d’en faire. Ça et des trains. Mais de toutes les matières, c’est l’éolienne que j’prèfère…

En haut des écluses

En haut des écluses

 

Le canal Erie en haut des écluses

Le canal Erie en haut des écluses

 

Une écluse

Une écluse

 

Contrebas de l'écluse

Contrebas d’une écluse

 

Waterford

Waterford

Je rentre dans Albany par le nord. Bon vent de face depuis quelques heures. Je vais dans un magasin de vélo que j’avais repéré, pour récupérer un carton. Et oui, demain je rentre en bus, et évidemment, on ne peut pas prendre de vélo tel quel avec soi. Il faut donc l’emballer, ce qui sera facile avec un gros carton à vélo.

Problème: transporter la grosse boîte. Y’a un vent de fou, je sais d’avance que transporter la grosse boîte en la tenant à bout de bras est suicidaire, mais évidemment j’essaye quand même. Après m’être pété la gueule, je réfléchis un peu. Je finis par rouler la boîte sur elle-même, ce qui n’est pas facile, vu que c’est du carton fort. Je coince le gros truc entre mon sac à dos et mon dos, et roule. Le carton dépasse de 50 cm de chaque côté, je ressemble un peu à Buzz l’éclair, mais au moins je suis stable.

Quelques bornes et me voilà chez Julien. Sur le chemin on me demande: « What is that for? Aerodynamism? » « No, I’m trying to fly, but so far, it hasn’t worked… » (« Ça sert à quoi, ça? C’est pour l’aérodynamisme? » « Non, j’essaye de voler, mais pour l’instant ça marche pas… »)

Je suis en avance, alors je repars faire un petit tour dans Albany. À un moment, je vais de feu en feu en même temps qu’une Mercedes. Après quelques centaines de mètres la conductrice me dit « You sir are a serious biker! » (« Vous, monsieur, êtes un cycliste sérieux! »). Je lui demande pourquoi, elle me dit « You’ve been keeping up with me for a while » (« Ça fait un moment que t’arrives à me suivre »). Je lui réponds qu’il y a que des feux rouges…ah, les américains et le vélo, ça fait un peu pitié.

Avion en kit

Avion en kit

 

Mercedes

Mercedes

 

Ça monte, Albany

Ça monte, Albany

 

Architecture soviétique version américaine

Architecture soviétique version américaine

Je vais déguster le cidre du coin, dans une petite cidrerie que j’avais repérée sur le chemin. Miam! Je repars un peu bourré, me fais crier dessus par un abruti, puis rentre à fond chez Julien, en faisant l’aspi à des voitures.

Petite sieste sur la pelouse, et la petite famille arrive. Ah, ça fait plaisir de se voir! On jase, on mange, on regarde le rugby, bonne nuit.

La journée sur Strava: https://www.strava.com/activities/395830706 et https://www.strava.com/activities/395830712