Samedi 12 Janvier 2019: vive le vent d’hiver

Enfin, une de ces froides et très ensoleillées journées d’hiver comme je les aime. L’occasion d’un exercice qui m’avait manqué: un 200 « sous zéro », ou plutôt sous -13 en l’occurence. Presque pas de photos, désolé.

Dans ma sacoche: 4 thermos de thé, des fringues de rechange en veux-tu en voilà, des biscuits, des dattes, un peu de chocolat.

Je quitte la ville par mon itinéraire de prédiction, la voie maritime du Saint-Laurent. Seul bémol: il faut passer le vélo au-dessus des barrières de l’estacade du Pont Champlain. Parce qu’évidemment, en hiver tout s’arrête et les gens/cyclistes disparaissent sous terre, alors tout ça c’est fermé. Sauf qu’en pratique le vent a balayé l’estacade sur laquelle y’a plus un pet de neige, et la voie maritime a été grattée.

Le soleil se lève. Je suis tout seul au milieu du fleuve. Les glaces chantent. C’est beau.

Ça se corse quand la route tourne vers l’ouest. Le vent est levé, la manche a air de la voie maritime bien gonflée. C’est parti pour 100 km de rude bataille.

Je me rends compte une fois arrivé sur la rive sud que le froid et la charge en partie inutile ont déchiré ma sacoche. « Oh non! », dis-je à voix haute. J’ai rien pour réparer (et par -19 autant oublier ça direct), mais j’ai une chambre à air de rechange que j’enroule autour de la victime pour limiter les dégâts.

Le vent est fort et en pleine face. J’en chie. Lindbergh a écrit à propos de sa passion aviatrice que « Adventure lay in each puff of wind », il avait raison: là en voilà, de l’aventure, dense et froide.

Évidemment, j’avance pas malgré la grande quantité d’énergie déployée. Avec les pneus à clous, le vélo de ville, la sacoche, je suis pas efficace.

Cerises sur le gâteau congelé:

  • Je teste pour la première fois des « bar mitts », sorte de gros sur-gants accrochés au guidon. C’est super efficace contre le froid, mais pour l’aérodynamisme on repassera.
  • Le rapport le plus faible sur mon vélo est 46×22. Bien trop long pour moi dans ces conditions. Je dois me mettre en danseuse souvent…ce qui nuit encore à l’aérodynamisme de l’ensemble. En gros je me sens comme une planche de contre-plaqué de 1 m par 2 m face au vent.

40 km au compteur: premiers biscuits et thé à Léry. Puis la bataille reprend. Faut pas s’arrêter trop longtemps sinon on a vite froid.

Bataille, bataille. Il fait super beau. Un peu froid aux pieds parfois, mais rien de terrible.

J’avance pas. Je peine à maintenir 17 km/h, puis 15. Je m’arrête tous les 15-20 km pour engloutir des biscuits et dattes. Le thé, bien que de moins en moins chaud, fait toujours du bien.

Je finis par arriver à Coteaux-du-Lac, ou je change un peu de cap, vers le nord. J’ai maintenant le vent un peu moins contre moi. Et il mollit. Je vais pas plus vite pour autant, ces 100 km de lutte m’ont pas mal drainé.

Km 105, pschhhhhhhh crevaison à l’avant. Dans la cambrousse et dans le vent: pas idéal. Mais il y a une maison derrière laquelle je pourrais m’abriter pas très loin. Je marche jusque là et suis accueilli par Luc, qui m’ouvre son garage et m’aide à réparer. Merci l’ami.

Je reprends la route pour un détour me permettant de contourner une route fermée en hiver par laquelle je pensais passer…quelques bornes en plus, on n’est plus à ça près.

La campagne resplendit de lumière. La quiétude est parfois troublée par les vroum-vroum des motoneiges, mais ça reste agréable.

Le vent est maintenant avec moi, mais a molli énormément. J’ai plus à me battre, sauf dans quelques petites côtes, mais je dépasse pas souvent les 20 km/h. Vue ma forme actuelle fallait pas s’attendre à un miracle de toutes façons.

J’ai faim et suis à court de biscuits. Je pousse quelques kilomètres et finis par arriver à Saint-Lazare, où je prends une soupe et des pâtes dans un café sympa. À côté de moi des nanas parlent d’applications de fitness en mangeant du gâteau au chocolat et en disant que par ce temps, y’a aucune raison d’être dehors. Bref, on n’est pas dans le même monde.

Je leur taxe leurs restes de gâteaux, jase un peu avec le gars du bistrot et repars. Le soleil vient de se coucher, il est environ 16h45 et il me reste 65 km à parcourir.

Vu que je suis rincé, j’avance pas. Mais les pâtes m’ont quand même fait du bien.

Il y a un peu de trafic du samedi soir par endroits, mais à part ça, je chantonne dans les quartiers résidentiels déserts. La nuit glaciale à venir dissuade beaucoup de faibles gens de mettre le nez dehors.

Tant bien que mal je rejoins l’île de Montréal, puis longe le fleuve jusqu’au canal de Lachine, et traverse la ville comme d’habitude, mais en plus lent.

La maison! Je suis content d’être arrivé. Ça faisait longtemps que je ne m’étais pas fatigué autant. La longue distance en hiver c’est quand même physique.

La maisonnée ne m’a pas attendu pour la raclette, mais m’en a laissé. Katia s’occupe de moi, je suis un pacha fatigué. Les patates fromagées vont me permettre de récupérer.

Sur Strava: https://www.strava.com/activities/2075658647